« 3 mois pour avoir un rendez-vous » : le gynécobus part à la rencontre des villages isolés du Var

Direction Ginasservis (Var), un village d’un peu moins de 2 000 habitants. Là-bas, sur le parking en face de l’Intermarché, un petit bus. Plutôt une sorte de camping car. A l’intérieur, une première salle de consultation, avec Noémie, sage-femme, Gérard, gynécologue et Maeva, qui s’occupe de toute la logistique. Candice est sur la liste des patientes de la matinée. Elle a 15 ans, et elle est venue avec sa mère pour un rendez-vous gynécologique. Elle consulte à cause de règles douloureuses. Noémie Falzon, la sage-femme, lui pose quelques questions. Juste à côté de cette salle, une 2ème avec cette fois un fauteuil et tous les outils nécessaires à un examen gynéco. Beaucoup de jeunes filles se rendent au gynécobus pour leur premier rendez-vous. « Je sais que c’est pas évident d’être dans un camping-car, donc j’essaie de les mettre à l’aise. Souvent, y’a des petites choses qu’on n’ose pas dire, on a peu honte. Donc, j’essaie de parler de leurs douleurs, de ce qu’elles ressentent », confie Noémie Falzon, 25 ans.

Faire face aux déserts médicaux

Ce petit bus se déplace dans 42 villages du Haut-Var. Il est en partie financé par l’Union européenne, avec le fonds européen agricole pour le développement rural. Avec un objectif : toucher le plus de femmes possibles. Certaines d’entre elles n’ont pas de vu de gynécologues depuis plus de dix ans. Par exemple, des femmes pour qui l’accès aux cabinets médicaux est compliqué. « C’est la 2ème fois que je viens, et je trouve ça super pratique. C’est à côté de mon village à moi, j’habite à Rians. Dans les cabinets, je trouve que c’est un peu long les rendez-vous », détaille Candice. Un constat partagé par Noémie Falzon : « Je viens de Rians aussi, donc je sais ce que c’est de galérer à avoir un médecin, à avoir une sage-femme. On multipliait un peu les rendez-vous, avec pas forcément le bon praticien. On allait voir le médecin généraliste, qui savait pas trop, qui nous réorientait. On allait voir beaucoup de monde. Et souvent, je finissais par aller sur Aix-en-Provence, où j’attendais trois mois en moyenne pour avoir un rendez-vous. Pour un renouvellement de pilule, je trouve ça dommage ».

« Les sage-femmes aussi ont des compétences », Noémie Falzon

Ce gynécobus sert aussi à désengorger les services médicaux. Selon le motif de consultation, pas forcément besoin d’aller voir un gynécologue. Les sage-femmes ont de nombreuses compétences. « Dès que la patiente va bien, on peut dépister tout ce qui peut ne pas bien aller. On peut la suivre complètement. Le suivi frottis, le suivi prescription de mammographie, prescription de tous les médicaments dont elle va avoir besoin, etc. On peut poser un stérilet, retirer un implant, on peut tout faire », énumère la jeune sage-femme. « Et c’est vrai que c’est un peu difficile à faire rentrer dans la tête des gens », sourit-elle.

350 femmes ont accès à ce gynécobus tous les mois

Un outil intéressant pour palier les déserts médicaux, mais ce n'est pas une solution durable, selon Laure Fabre. Elle est la co-fondatrice du dispositif, et également sage-femme. « Il y a aussi des inconvénients. C’est un dispositif mobile. C’est-à-dire qu’on bouge tout le temps, on ne peut pas faire de suivi à long terme. Les médecins et les sage-femmes ne sont jamais les mêmes. Ce n’est pas forcément facile pour les femmes. A partir du moment où on a créé une relation de confiance, c’est quand même chouette d’avoir tout le temps la même personne en face de nous », détaille Laure Fabre.

C’est en tout cas un dispositif qui se développe à travers la France. La région Grand Est a annoncé, le mois dernier, investir dans six gynécobus, dans les Ardennes et dans la Marne.