Le sommeil des Français se dégrade depuis plusieurs années, et cela ne va pas en s’arrangeant. En moyenne, nous ne dormirions que 6h58 par nuit et nous serions un dixième à prendre régulièrement des médicaments pour combattre les insomnies. Comment réapprendre à bien dormir ?
- Isabelle Arnulf Neurologue, directrice de l'unité des pathologies du sommeil de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière et chercheuse à l'Institut du cerveau et de la moelle épinière
- Lionel Naccache Neurologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, chercheur en neurosciences à l'Institut du Cerveau et professeur à Sorbonne Université
Pour y répondre nous recevons Isabelle Arnulf, neurologue, cheffe du service des Pathologies du sommeil à la Pitié-Salpêtrière à Paris, et autrice de Une fenêtre sur les rêves : neurologie et pathologies du sommeil (Odile Jacob 2022), ainsi que Lionel Naccache, neurologue à l’Institut du Cerveau de la Pitié-Salpêtrière à Paris, spécialiste des neurosciences cognitives, professeur à Sorbonne Université et chroniqueur à la matinale de France Culture chaque vendredi.
Une activité cérébrale différente
Bien qu’il fasse partie intégrante de nos quotidiens et influe autant sur notre état le jour durant, nous avons peu l’habitude de nous interroger sur le sommeil et ses fonctions. La neurologue Isabelle Arnulf nous en rappelle l’utilité. « Le sommeil se définit d’abord par l'immobilité corporelle, les muscles sont relaxés et la respiration devient calme et régulière. Notre cerveau devient moins sensible aux stimulis extérieurs et son activité ralentie. Cette baisse de réactions souligne un changement du travail cérébral où la mémoire se consolide et les émotions négatives sont digérées. Contrairement à ce que l’on a pu penser auparavant, le sommeil n’est donc pas un état de retrait, mais un moment d’activité cérébrale différente où de nombreuses associations se mettent en place. » Le sommeil nous permet alors de reposer le corps mais aussi de consolider nos réserves énergétiques.
Ce travail essentiel de récupération a des effets profonds sur la santé ajoute Lionel Naccache. « Nous passons environ un tiers de notre existence dans cet état mystérieux. C’est un peu la phase cachée de notre vie puisque nous en avons aucun souvenir précis mais du point de vue neurologique et médical, des interactions fondamentales s’y construisent. En tant que praticiens, nous sommes très souvent poussés à interroger sur la qualité de leur sommeil les patients qui viennent nous consulter quand bien même ils s’adressent à nous pour d’autres motifs. De fait, interroger et observer la structure et le fonctionnement du sommeil d’un patient va souvent nous ouvrir des fenêtres très riches. Je pense ici à des plaintes de mémoire ou des symptômes d’entrées cognitives par exemple. »
Troubles du sommeil
De fait, le manque de sommeil se répercute sur de nombreux aspects de notre santé corporelle mais aussi psychique affirme Isabelle Arnulf. « Le sommeil est l’un des trois piliers de la santé avec l’alimentation et l’exercice. Une personne qui dort moins parce qu'elle se lève tôt ou parce qu'elle réduit ses temps de sommeil aura beaucoup plus de risques de prendre du poids, d'avoir de l'hypertension, de développer du diabète ou de se défendre moins bien contre les infections. Le manque de sommeil a véritablement un effet corporel. Les carences engendrent aussi un certain nombre de troubles cognitifs, comme des difficultés à mémoriser, de l’irritabilité, des difficultés à gérer les émotions ou à interpréter la vie relationnelle. » Des complications qui peuvent s’ajouter aux souffrances que sont déjà en soit les troubles du sommeil comme l’insomnie et l’hyper-éveil.
Conseils pour mieux dormir
Mal dormir n’est pas une fatalité. Pour accroitre son temps et sa qualité de sommeil, plusieurs stratégies et habitudes peuvent être mises en place rappelle Isabelle Arnulf. « La première solution reste de faire régulièrement de l'activité physique puisqu’elle favorise le sommeil de plein de manières différentes. En particulier, elle va aider à fabriquer un sommeil plus profond, lent et continu, tout en remplaçant partiellement la dette de sommeil. Si vous faites par exemple trente minutes de sport, vous économiserez à peu près l'équivalent en sommeil. Le processus est identique pour la mémorisation comme le prouvent des travaux tout récents. Si avant de faire un apprentissage, vous faites vos trente minutes de vélo et puis que vous ne dormez que cinq ou six heures au lieu de vos sept heures habituelles, la consolidation amnésique sera aussi bonne que les sept heures. » Eviter les écrans reste aussi un fondamental. « Les écrans de téléphone et d'ordinateur contiennent des LED bleus qui bloquent la mélatonine. Ils sont l'équivalent d'une journée en plein soleil et communiquent au cerveau le signal de l’éveil, le poussant à retarder le sommeil. »
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