Critique expos : voyage en Italie pour la Biennale de Venise !

Collectif chilien, Bordadoras de Isla Negra à la 60e Biennale de Venise - ©Marco Zorzanello
Collectif chilien, Bordadoras de Isla Negra à la 60e Biennale de Venise - ©Marco Zorzanello
Collectif chilien, Bordadoras de Isla Negra à la 60e Biennale de Venise - ©Marco Zorzanello
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Cap sur l'Italie avec un programme spécial à l'occasion de la 60e Biennale de Venise. L'occasion de découvrir l'exposition internationale, les coups de cœurs de nos critiques parmi les 88 pavillons nationaux et l'exposition consacrée à l'artiste Pierre Huyghe. Prêts ? Nos critiques vous embarquent !

Avec

Place à la critique, et place non pas à deux expositions, mais à 350 artistes, presque 100 pays et nationalités représentés, une exposition internationale, 88 pavillons nationaux, sans parler des expositions en plus, et sans oublier non plus l'exposition consacrée à l'artiste contemporain Pierre Huyghe ; le tout sur sept mois ! Place pour le dire autrement à la Biennale de Venise, édition numéro soixante, comme si vous y étiez !

L'exposition internationale : "Étrangers partout"

Du 20 avril au 24 novembre 2024 à l'Arsenale et au pavillon central des Giardini à Venise

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Pour cette 60e édition, le commissaire Adriano Pedrosa a choisi d'inviter "à une réflexion sur les multiples crises migratoires et sur les différentes expériences des étrangers". D'où ce titre Étrangers partout. Si ce thème, c'est vrai, n'a rien d'original au vu de la création contemporaine et évidemment de l'actualité, les choix le sont un peu plus : donner la parole à des artistes et des collectifs du Sud, avec l'Amérique latine, l'Afrique et le Moyen-Orient, mettre au premier plan des artistes queer, outsider et indigènes et mettre aussi en avant la continuité entre l'art et l'artisanat. Ainsi, céramique, tricot, crochet et broderie sont à découvrir.

"William   Buckley Interpreter" en 2023 par l'artiste aborigène Marlene Gilson
"William Buckley Interpreter" en 2023 par l'artiste aborigène Marlene Gilson
- ©Marco Zorzanello
Les œuvres en mosaïque de l'artiste libanais Omar Mismar
Les œuvres en mosaïque de l'artiste libanais Omar Mismar
- ©Marco Zorzanello

L'avis des critiques :

  • Yasmine Youssi a été très enthousiasmée par cette exposition : "aborder cette thématique dans l'Italie de Georgia Meloni et alors que la Biennale est elle-même dirigée par un journaliste très à droite, je trouve ça très osé et c'est ce qui m'a beaucoup plu". Elle a aimé la mise en avant d'artistes non occidentaux : "ils sont inscrits dans l'histoire de l'art au même titre que les autres et on découvre des gens que l'on a absolument jamais vus". Comment explique-t-elle le titre de cette exposition ? "Étrangers partout, ailleurs, chez soi, tout le temps, c'est ce qui apparaît".
  • Joseph Ghosn partage l'enthousiasme de Yasmine Youssi : "j'ai vu une déferlante d'œuvres avec cette thématique qui semble assez répandue, mais qui, une fois montrée et construite souligne quelque chose de très fort, j'avais l'impression d'être dans un endroit qui prenait la température exacte du monde". Il note que l'hyper-contemporain n'est pas au cœur de cette exposition : "on est dans une vision très historique, avec quasiment un siècle d'histoire de l'art réécrite, et ce, de façon très différente".

Les coups de cœur des critiques : 88 pavillons nationaux à découvrir

Du 20 avril au 24 novembre 2024 aux Jardins de l'Arsenale et dans le centre-ville de Venise

Cette année, la Biennale de Venise déploie 88 pavillons nationaux, et parmi eux de nouveaux venus comme le Bénin et l'Éthiopie, mais aussi le Nicaragua et le Sénégal qui participent pour la première fois avec leurs propres pavillons. Mais également des absents et des pavillons qui restent fermés. Il faut notamment signaler celui d'Israël dont l'artiste Ruth Patir et les commissaires réclament un cessez-le-feu à Gaza et la libération des otages israéliens par le Hamas.

Le Pavillon italien pour la 60e Biennale de Venise
Le Pavillon italien pour la 60e Biennale de Venise
- ©Andrea Avezzù
Le Pavillon du Bénin à la 60e Biennale de Venise
Le Pavillon du Bénin à la 60e Biennale de Venise
- ©Andrea Avezzù

L'avis des critiques :

  • Yasmine Youssi rappelle que les pavillons suivent le jeu de la loterie : "les états mandatent des artistes pour les représenter, mais les pavillons ne représentent pas toujours l'idéologie de leur pays". Elle a eu un coup de cœur pour la participation du pavillon béninois, dont c'est cette année la première participation politique, et relève également la présentation du pavillon espagnol : "il nous apprend à regarder la colonisation avec des œuvres classiques, c'est une véritable école du regard".
  • Jospeh Ghosn a été frappé par le pavillon italien : "on voit une immense structure métallique qui ressemble à un chantier, avec une musique qui bourdonne. Quand on entre, on est pris par cette musique qui est en fait de l'orgue". Qu'est-ce que cela a créé chez notre critique ? "C'est comme si on était à l'intérieur et que l'expérience spirituelle était déplacée dans un endroit désacralisé, je m'y suis totalement perdu". Il a été également touché par le travail de Julien Creuzet, représentant du pavillon français.
39 min

L'exposition de Pierre Huyghe : "Liminal"

Du 17 mars au 24 novembre 2024 à la Punta della Dogana à Venise

L'exposition intitulée Liminal donne à voir des créations inédites et des œuvres produites par Pierre Huyghe ces dix dernières années. On y retrouve ses interrogations sur les rapports entre humains et non-humains, sur leur devenir possible et leur hybridation entre des individus robotiques, un film autogénéré et l'intelligence artificielle, le tout dans une obscurité inquiétante.

Pierre Huyghe, Liminal, 2024
Pierre Huyghe, Liminal, 2024
- © Pierre Huyghe
Pierre Huyghe, De-Extinction, 2014 Pinault Collection
Pierre Huyghe, De-Extinction, 2014 Pinault Collection
- © Pierre Huyghe, by SIAE 2023

L'avis des critiques :

  • Yasmine Youssi est ferme : "il faut impérativement aller voir cette exposition !" Alors pourquoi ? "C'est une œuvre en soi : toutes ces œuvres mises ensemble dessine un univers de fin du monde dans lequel on est complètement immergé". Dans la salle, une vidéo produite par intelligence artificielle promet une "expérience qui se vit" : "la vidéo évolue en fonction des mouvements des gens dans la salle, c'est vraiment unique".
  • Joseph Ghosn a été effrayé autant qu'il a aimé : "j'ai eu très peur ! On arrive dans le noir, et 'Liminal' qualifie des choses que l'on ne perçoit pas. Petit à petit, nos yeux s'habituent pour nous laisser entrevoir des formes qui sont en réalité des êtres vivants comme vous et moi". Malgré l'impression d'un "monde très effrayant", l'exposition donne à réfléchir "sur notre sentiment par rapport à ce monde décrépi que l'artiste montre, c'est très prenant, ça reste en tête".

Extraits sonores :

  • Chanson Venise pour l'éternité d'Hervé Vilard
  • Archive de Pierre Huyghe le 8 octobre 2013 dans Le Rendez-vous sur France Culture

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