Des bouleaux et des mots avec Auður Ava Ólafsdóttir

Auður Ava Ólafsdóttir le 14 octobre 2022 ©Getty - Leonardo Cendamo
Auður Ava Ólafsdóttir le 14 octobre 2022 ©Getty - Leonardo Cendamo
Auður Ava Ólafsdóttir le 14 octobre 2022 ©Getty - Leonardo Cendamo
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Aujourd’hui, le "Book Club" arpente les paysages d’Islande, en compagnie de l’autrice Auður Ava Ólafsdóttir dont le dernier roman "Éden" vient de paraître aux éditions Zulma.

Un achat de terrain, des travaux BTP, une campagne de don de sang, l'accueil des personnes exilées, le son d'une rivière, une lectrice de manuscrits, un empailleur d'animaux, tout un tas de considérations linguistiques, un certain sens de l'humour, de la délicatesse, des arbres à planter, un jardin à aimer, des liens familiaux, voilà ce que l'on trouve dans  Éden le dernier roman de la grande écrivaine islandaise Auður Ava Ólafsdóttir paru aux éditions Zulma. Elle est de passage à Paris et elle est l'invitée du Book Club.

C'est peu dire que la narratrice du dernier roman d’Auður Ava Ólafsdóttir est concernée par les mots. Elle est correctrice de manuscrits, elle se rend dans des colloques de langues rares, elle enseigne, elle connaît le nombre moyen de mots utilisés par les citoyens de son pays pour communiquer. Bref, le langage, ça l'intéresse. Grâce à un rêve, elle achète une maison sur un terrain de roche, de lave et de sable, et comme par hasard, c'est celle d'une écrivaine. Entre ces murs, dans ce village, débute une vie nouvelle pour elle. C'est dans ce moment délicat de réinvention de soi, que nous rencontrons Alba, et c'est peu dire que l’écriture de l’autrice, sa sensibilité, son art romanesque nous fait immédiatement l'aimer.  Éden, est roman, où l'on croise une liste importante, celle des choses qui échappent aux règles du langage : Marcher dans la nature, travailler dans le jardin, biner les pommes de terres, respirer, regarder le ciel au-dessus de la montagne ou écouter les oiseaux.

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Une littérature métaphorique

Voici comment fonctionne la littérature pour ’Auður Ava Ólafsdóttir ; "Pour moi, la littérature fonctionne ainsi : il faut tout mettre à l'échelle humaine. On utilise les petites choses de la vie quotidienne pour parler de quelque chose de plus important. La souffrance d'une personne, c'est la souffrance du monde. C'est un peu comme le dessin d'un enfant : un arbre signifie une forêt. C'est métonymique, c'est vraiment la partie pour le tout. La littérature fonctionne aussi par les oppositions : si on veut parler de la vie, il faut parler de la mort. Par exemple, dans un roman précédent qui s'appelle La vérité sur la lumière, pour parler de la lumière dans un monde noir, il fallait situer l'histoire au moment le plus sombre de l'année en Islande, justement juste avant Noël, parce que c'est là qu'on comprend vraiment le sens de la lumière. Dans un roman, on organise le chaos qu'on appelle la vie ou la réalité, en lui donnant un sens, et en le réduisant un peu comme une sauce, et puis on finit avec le bouillon en cube."

La vie avant tout

Auður Ava Ólafsdóttir s'explique : "Dans mon livre, j'écris qu'une langue meurt chaque vendredi. J'exagère un petit peu quand même, parce qu'il faut toujours mentir un peu pour dire la vérité. En fait, c'est deux langues par mois qui meurent, que l’on perd, et avec elles, une manière de penser, de regarder le monde, une culture. Alors, moi, j'écris sur la survie, comment survivre, je ne tue pas mes personnages. La question qui m’intéresse et qui est la plus difficile est de savoir comment survivre, comment continuer à vivre. Dans ce roman, il y a la réparation de quelque chose de soi et en même temps le fait de repartir de zéro et d'essayer de construire son petit coin d’Éden, chacun à sa façon."

La note vocale

La question de Lucie @la_revue_nordique à Auður Ava Ólafsdóttir : "J’ai eu un coup de cœur pour votre dernier roman et plus particulièrement pour le personnage d’Alba, dont j’ai beaucoup apprécié la résilience, l’humilité, et l’engagement qui se manifeste de plusieurs façons. J’ai souvent remarqué dans vos romans l’importance de la langue, le pouvoir des mots, d’où ma question aujourd’hui : d’où vous vient cet amour de la langue que l’on ressent dans vos romans, et comment avez-vous réussi dans celui-ci à parler de linguistique, tout en gardant une certaine fluidité et une très belle harmonie ?"

Auður Ava Ólafsdóttir répond : "Je pense que cet intérêt pour les langues, ça vient en partie du fait que ma spécialité, c'est en quelque sorte d'écrire dans une langue que personne ne comprend et qui est parlée par 350 000 habitants, à savoir l’islandais. C'est une langue ancienne assez difficile, assez compliquée et c'est la plus vieille langue encore parlée en Europe. C'est un peu comme le latin des langues nordiques. Alors, dans ce livre, j’avais envie d'écrire un roman qui était comme une sorte de poème d'amour à cette langue, et j'avais aussi envie de donner une petite leçon d'islandais."

Le grand Jeu des pages musicales

Comme chaque jour en fin d’émission, l’heure est venue de jouer à notre grand jeu des pages musicales. Pour jouer avec nous, c’est très simple : si vous repérez, au gré d’une de vos lectures, un passage qui évoque un morceau de musique, prenez-le en photo ou relevez le texte par écrit, et envoyez-le-nous via le compte Instagram de l’émission ou sur notre mail "lebookclub@radiofrance.com".

Archive

Jón Kalman Stefánsson, émission L’heure bleue, France Inter, Laure Adler, 06/01/2022

Références musicales

Sigur Ros, Vid Spilum Endalaust

Hildur Gudnadottir, Maundy

Whitney Houston, I Will Always Love You

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