Estonie, "Défense" : épisode • 9 du podcast Les termes du débat européen

Des soldats estoniens et britanniques participent à un exercice dans le cadre de l'opération EFP de l'OTAN au camp militaire estonien de Tapa, le 6 février 2022 ©AFP - Alain Jocard
Des soldats estoniens et britanniques participent à un exercice dans le cadre de l'opération EFP de l'OTAN au camp militaire estonien de Tapa, le 6 février 2022 ©AFP - Alain Jocard
Des soldats estoniens et britanniques participent à un exercice dans le cadre de l'opération EFP de l'OTAN au camp militaire estonien de Tapa, le 6 février 2022 ©AFP - Alain Jocard
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Depuis le début de l'invasion russe, l'Estonie est l'un des pays les plus mobilisés dans le soutien à l'Ukraine et consacre 3% de son PIB à la défense. De nombreux civils ont rejoint la Ligue de défense pour se préparer face à la menace russe. Quelle stratégie de défense pour l'Estonie ?

Avec
  • Céline Bayou Chargée de cours à l'INALCO, chercheure associée au CREE (Centre de recherches Europes-Eurasie) de l'INALCO et rédactrice en chef de la revue en ligne Regard sur l'Est.
  • Kersti Kaljulaid Ancienne Présidente de l'Estonie, de 2016 à 2021

Les trois pays baltes ont signé mi-janvier un accord pour une zone de défense baltique aux frontières russes et biélorusses. Accord qui prévoit, pour la seule Estonie, la construction de 600 bunkers frontaliers.

Car, de toutes les nations européennes, les pays baltes ont été les premiers, dès leur entrée dans l’Union en 2004, à alerter sur la menace russe sans être forcément entendus par des pays qui tentaient alors de séduire Vladimir Poutine.

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Mais, depuis la guerre d’agression en Ukraine, l’Estonie et les deux autres pays baltes, membres de l’OTAN comme plus récemment leurs voisins finlandais et suédois, apparaissent comme des capteurs d’un risque géopolitique majeur.

Le Reportage de la Rédaction
4 min

Estonie, dans quoi s’inscrit sa stratégie de défense ?

Céline Bayou : « Je dirais que le 24 février 2022 a été une espèce de réveil assez violent. L'Estonie et les pays baltes ont toujours gardé un rapport à la Russie qui était un rapport de méfiance. Au moment où on a eu une espèce d'enthousiasme, notamment durant les années 90, c'est-à-dire avant l'arrivée de Poutine, je crois qu'il y avait vraiment un enthousiasme du côté ouest européen, et on se disait que la Russie allait devenir un État « normal », démocratique, etc. Mais il y a toujours eu une méfiance en Estonie, qui se disait que malgré la période il fallait « faire attention ». Et donc au nom de cette histoire, au nom de cette proximité géographique, quand Poutine arrive au pouvoir en 2000, quand il y a les événements en Géorgie en 2008, quand il y a la Crimée en 2014 puis l’invasion en 2022, ça a été à chaque fois des coups de semonce pour l’Estonie ». Pour Céline Bayou, les états baltes, ont souvent tenté d’alerter la communauté internationale, sans être écoutés : « Je pense que les Baltes, à chaque fois, ont essayé de nous alerter. Quand je dis « nous », c'est l'UE et l'OTAN en particulier, en soulignant qu'il y avait un problème avec la Russie et que le dialogue que tentait de préserver les autres Etats était vain ».

L’ancienne présidente estonienne Kersti Kaljulaid explique cette stratégie de défense , qui selon elle doit notamment passer par l’aide apportée à l’Ukraine : « En Baltique, nous pensons que tous les pays baltes, et même jusqu'à la Pologne, jusqu'à la Suède qui vient de rejoindre l’OTAN, doivent être unis pour nous défendre. Parmi nos plans, il y a notamment la fortification des frontières. Elle explique que pour le pays, l’un des points importants est le soutien à l’Ukraine : « L’Estonie dépense 3% de son PIB pour la défense et nous avons dépensé 1,3 milliards d’euros pour aider l'Ukraine. Si on regarde ce qu'ils font en Russie, ils dépensent un tiers de leur budget, 30% déjà, pour la guerre. Et nous dépensons seulement 0,2%, donc rien, en fait. Donc, si on peut doubler, on sera en avance. Mais en ce moment, on peut voir en Ukraine que le manque de ressources qui a commencé en novembre, a déjà eu d’importants effets négatifs, c’est donc urgent d’agir rapidement dès maintenant. Mais si on fait peut-être un peu plus, l'Ukraine va gagner cette guerre. Il n'y aura pas de nécessité de "mourir pour Dantzig" (« Mourir pour Dantzig » est le titre d'un éditorial de Marcel Déat paru en une du journal l'Œuvre en 1939, qui a symbolisé la grande discussion d'avant la Seconde Guerre mondiale concernant l'engagement dans un conflit armé, une expression qui ressurgit aujourd'hui sur les réseaux et dans les discussions entre partis politiques) ».

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