Quel est l'impact réel de la pornographie chez les enfants et les adolescents ?

Quel est l'impacte de la pornographie chez les enfants et les jeunes ©Getty - Maskot
Quel est l'impacte de la pornographie chez les enfants et les jeunes ©Getty - Maskot
Quel est l'impacte de la pornographie chez les enfants et les jeunes ©Getty - Maskot
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Des enfants de plus en plus tôt confrontés à des images classées X.

Et des adolescents qui y sont plongés en pleine construction de leur sexualité. La pornographie est-elle devenue un passage obligé dans leur éducation sexuelle ?

Est-ce normal qu’ils en regardent ? Ou alors est-ce une pratique nuisible pour leur développement psychologique ?

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L’industrie pornographique est-elle en train de détruire des générations entières ? Comme l’affirme l’une de nos invitées Thérèse Hargot.

Faut-il strictement réguler l’accès à la pornographie ?

Faut-il inciter les jeunes à ne plus en regarder ? Comment faire concrètement ?

Grand bien vous fasse !
51 min

Le porno représente 25 % du trafic web de vidéo à l’échelle mondiale

La pornographie s'est largement diffusée depuis les années 1970 pour les adolescents, et dans les années 1980, il était possible de regarder des films classés X en crypté ou de louer des cassettes VHS. À l'époque, l'accès aux images pornographiques était encore relativement difficile. Aujourd'hui, la diffusion du porno s'est accélérée avec l'avènement d'Internet et il représente 25 % du trafic web de vidéo dans le monde.

"Il est impossible d’interdire la pornographie"

Pour David Cohen, professeur à Sorbonne-Université et chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris, l'exposition à la pornographie est un phénomène d'ampleur croissante dans toute la société, avec une part non-négligeable d'enfants et un nombre important d'adolescents qui y sont exposés. Mais selon lui, il est impossible de bannir la pornographie de notre société : « C'est un combat qui n'a aucun sens. On constate qu'aujourd'hui l'accès à la pornographie est extrêmement important chez les enfants et chez les adolescents. Au-delà de la globalité et de la fréquence, c'est le fait que l'accès se fait directement par le téléphone majoritairement chez les adolescents. À l’époque de la pornographie à la télévision, celle-ci était rigide et contrôlée sauf que plus personne ne regarde les films pornographiques à la télé. Aujourd’hui, la réglementation sur les réseaux et sur les grands fournisseurs d'Internet est quasiment inexistante au même titre que les fake news par exemple. »

Un problème de consentement lié à la pornographie

La majorité des collégiens et des lycéens ont été exposés à des images pornographiques alors qu'ils ne souhaitaient pas les regarder. Pour Thérèse Hargot, thérapeute de couple, sexologue, conférencière et essayiste, il y a un problème de consentement également quand il s'agit de pornographie : « Être exposé à ces images qui vont provoquer une excitation sexuelle en vue de la masturbation, c'est aussi imposer une expérience sexuelle à des enfants qui ne sont pas encore en capacité à pouvoir choisir cette expérience et pouvoir bien la vivre. Nous avons besoin d'une protection des mineurs pour que les enfants ne tombent pas sur ce type de contenus. Même les parents informés ne peuvent pas protéger leurs enfants. Nous avons besoin d'une action politique pour nous aider en tant que parents. »

Une industrie qui cherche à fidéliser ses consommateurs dès le plus jeune âge

La pornographie est une industrie très lucrative. Selon un rapport du Sénat publié en 2022, elle génère 140 milliards de dollars par an. L'idée, c'est de rendre dépendant un maximum de visiteurs à ces dizaines de milliers de sites pornographiques. Comme l’explique Thérèse Hargot, le business model de cette industrie est simple : « Pour que ces plateformes génèrent de l'argent, ils vendent des espaces publicitaires, et pour cela, il faut qu'il y ait beaucoup d'utilisateurs et qu'ils reviennent souvent. Pour ces sites, plus on commence tôt, plus on s'assure d'avoir des consommateurs fidèles à l'âge adulte. Il y a un phénomène d'addiction qu'il faut installer dès le plus jeune âge, comme n'importe quel autre produit addictif. C’est pour ça que les enfants sont si exposés. Il faut savoir que les plateformes savent parfaitement que des mineurs consomment leurs contenus et pourtant, ils ne protègent pas plus. Il faut seulement cocher une case pour stipuler qu’on a 18 ans. Il faut comprendre que ce business model repose sur le principe de l'addiction, ce qui n'était pas le cas à l'époque de Canal+ où il fallait acheter un abonnement par exemple. »

Un lieu où l’on retrouve tous les stéréotypes de genres les plus dégradants

Pour David Cohen, il y a deux niveaux de conséquences dont on ne parle pas suffisamment en termes de cadrage. Il y a des conséquences individuelles comme le fait de voir des vidéos pornographiques sans l’avoir voulu, mais il y a aussi une capacité à digérer ce qu'a amené la pornographie à un moment donné : « Il ne faut pas oublier que la pornographie s’est développée en parallèle d'une forme de libération des tabous par rapport à la sexualité. Le problème, c’est qu’aujourd’hui, la pornographie est un des lieux dans la société où vous retrouvez tous les stéréotypes de genre les plus dégradants vis-à-vis des femmes ou ridicules vis-à-vis des hommes. »

Pour en savoir plus, écoutez l'émission...

À écouter : Sex Education
Zoom zoom zen
53 min

Avec :

  • Thérèse Hargot : thérapeute de couple, sexologue, conférencière et essayiste. Elle intervient en milieu scolaire.
    Autrice de : Tout le monde en regarde (ou presque). Comment le porno détruit l’amour, Albin Michel, 2024
  • Dr Kpote (Didier Valentin) : animateur de prévention vie affective et sexuelle dans les collèges, lycées et formations professionnelles. Il est également chroniqueur pour le magazine Causette depuis 2012. Auteur de : Pubère la vie, à l’école des genres , Editions du détour, 2023
  • Philippe Brenot : psychiatre-sexologue. Directeur des enseignements de Sexologie à l’Université Paris-cité. Auteur de : Eloge de la masturbation , La Musardine, 2024
  • David Cohen : professeur à Sorbonne Université et chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de l’hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris. Coordinateur du rapport de l’Académie Nationale de Médecine sur le sujet de l’exposition à la pornographie des enfants. Auteur de : Les pionniers de la clinique de l’autisme , Langage, 2024.

Et la chronique ma vie de parent de Julien Bisson

À écouter : Sex Education
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53 min

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