Italie, "Violences conjugales" : épisode • 10 du podcast Les termes du débat européen

Manifestation contre les violences faites aux femmes à Rome, le 25 novembre 2023.  "Le violent n'est pas malade c'est un enfant sain du patriarcat". ©Maxppp - Matteo Nardone
Manifestation contre les violences faites aux femmes à Rome, le 25 novembre 2023. "Le violent n'est pas malade c'est un enfant sain du patriarcat". ©Maxppp - Matteo Nardone
Manifestation contre les violences faites aux femmes à Rome, le 25 novembre 2023. "Le violent n'est pas malade c'est un enfant sain du patriarcat". ©Maxppp - Matteo Nardone
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Récemment, la sortie du film "Il reste encore demain" et le féminicide d'une jeune étudiante, Giulia Cecchettin ont replacé au cœur de la société italienne le sujet des violences conjugales. L'Italie vit-elle son MeToo des violences conjugales ?

Avec
  • Giuseppina Sapio Maîtresse de conférences en Sciences de l'information et de la communication à l'université Paris 8. Spécialiste de médiatisation des violences conjugales et des féminicides en Italie et en France.
  • Ilaria Boiano Avocate de l'association féministe italienne Differenza Donna

Mercredi est sorti dans les salles de cinéma françaises le film italien qui a drainé 5 millions et demi de spectateurs : C’e áncora domani, "il reste encore demain" de Paola Cortellesi.

Un film qui traite des violences conjugales dans l’Italie de l’immédiat après-guerre, sorti quelques semaines avant le féminicide commis par son ex-compagnon sur la jeune Giulia Cecchettin, âgée de 22 ans.

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Les discours de la soeur aînée de Giulia, ainsi qu’une tribune, publiée par elle dans le Corriere della Sera, insistant sur la responsabilité d’une société italienne patriarcale, ont bouleversé l’Italie et provoqué un débat renouvelé sur les violences faites aux femmes et les féminicides, d’autant que le père de la jeune femme assassinée a lui aussi pris la parole pour dénoncer le silence de la société italienne face à ces meurtres.

France Culture va plus loin le samedi
18 min

La (ré)ouverture du débat public sur les violences conjugales en Italie

Ilaria Boiano, à propos du succès du film italien « Il reste encore demain » : « Le succès du film confirme qu’il y a une politisation du sujet de la violence, de l'expérience en tant que question sociale. Donc, on a vu comment la narration cinématographique, qui à la fin du film, se déporte sur une réponse collective peut être une solution pour changer les choses. Lorsque l’on cherche à sortir d’une considération limitée à la vie privée des femmes, on trouve les racines culturelles et sociales de la violence conjugale et sexiste ».

Giuseppina Sapio souligne l’importance du féminicide de Giulia Cecchettin qui a eu lieu quelques semaines après la sortie du film : « Ce qui est très important pour expliquer en quoi le féminicide de Giulia Cecchettin a eu autant de retentissement, ce sont les caractéristiques de la victime et de l'agresseur, c'est-à-dire que tous les arguments que l'on retrouve généralement dans la presse, à savoir que les féminicides se produiraient par exemple dans des contextes particulièrement défavorisés etc. tombaient complètement à l'eau, puisque nous avions affaire à une famille de classe moyenne, avec une jeune étudiante très brillante. (…) Donc pour comprendre, il fallait faire appel à la seule catégorie d'analyse qui compte véritablement dans les cas de féminicide, à savoir le genre ».

Vers quoi se tourner pour diminuer les violences sexistes et sexuelles ?

Ilaria Boiano souligne que la justice italienne reste une instance qui ne prend pas en compte comme il se doit les violences sexistes et sexuelles : « Les femmes en Italie, selon le comité des Nations Unies, ne sont pas égales devant la loi à cause de la présence de préjugés et stéréotypes sexistes. Les autorités doivent chercher à changer de perspective et considérer la nécessité d’écouter et reconnaître la crédibilité des femmes qui dénoncent la violence sexiste dans notre pays ».

Giuseppina Sapio : « Nous avons un code pénal qui est extrêmement fonctionnel, qui a été agrémenté par des lois, justement, qui sont spécifiques sur les violences faites aux femmes. Et pourtant, on ne se déplace presque jamais du côté des représentations culturelles, voire même des médias. On est toujours sur le plan de la sanction et on est très rarement sur le plan de la prévention, donc de l'éducation, de la culture ».

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