IVG : 50 ans après la loi Veil, le tournant constitutionnel

Approbation par le Sénat de l'inscription de l'IVG dans la Constitution française, 28 février 24. ©AFP - Xose Bouzas / Hans Lucas
Approbation par le Sénat de l'inscription de l'IVG dans la Constitution française, 28 février 24. ©AFP - Xose Bouzas / Hans Lucas
Approbation par le Sénat de l'inscription de l'IVG dans la Constitution française, 28 février 24. ©AFP - Xose Bouzas / Hans Lucas
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Les sénateurs ont donc largement voté "conforme" comme les députés, pour l’inscription, dans la Constitution, du droit à l’avortement. Historique ?

« On n’écrit pas la Constitution seulement pour le présent, mais d’abord et surtout pour l’avenir », expliquait hier Eric Dupond-Moretti.

Et effectivement, nos parlementaires posent un puissant principe de précaution. Le droit à l’IVG n’est peut-être pas menacé aujourd’hui, mais demain ? Une loi peut toujours en défaire une autre… Mais une « liberté garantie » par la Constitution, c’est un verrou. Bon courage pour trouver 555 parlementaires qui assumeraient de revenir en arrière.

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3/5ème, seuil qui sera largement dépassé, lundi, quand députés et sénateurs viendront, à Versailles, confirmer une dernière fois leur vote.

L’aboutissement d’un long parcours législatif

La première tentative remonte à 2017, loi communiste, avant une autre, socialiste, à l’été 2019. Puis les sénateurs écologistes, dans leur niche, embrayent, à l’automne 2022, avant que les Insoumis et Renaissance prennent le relais à l’Assemblée. Sans parvenir à s'accorder avec les sénateurs : droit à ? Ou liberté ? Jusqu’à qu’à la synthèse gagnante, « liberté garantie », portée par le gouvernement.

Laurence Cohen, Mathilde Panot, Aurore Bergé, Mélanie Vogel, Laurence Rossignol : retenez leurs noms, 5 femmes qui auront fait bouger le Parlement.

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Que change cette inscription ?

La différence entre droit formel et droit effectif ne disparaît pas. Ce sera toujours aux élus, aux gouvernants, de mettre des moyens pour assurer l'égal accès, réduire les délais (7 jours en moyenne, 11 dans certains territoires) et empêcher les fermetures de centres IVG (130 en 15 ans).

Mais désormais, il y aura une corde de rappel au plus haut niveau si ça dérape, s'il prenait au législateur l'envie de limiter l'IVG, comme en Pologne, aux seules femmes victimes de viols ou d'inceste.

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La France pionnière, premier pays au monde à sanctuariser cette liberté ! Nous serons regardés, imités, on ouvre la voie ! Une leçon pour tous les Trump et mini-Trump. Une réponse aux régressions constatées outre-Atlantique.

Car partout où l’extrême droite est au pouvoir, il y a, par détournement de la religion, misogynie ou patriarcat refoulés, une attaque en règle des droits des femmes ! En Italie, le recours à l’IVG dépend des régions, et dans les collectivités dirigées par le parti de Meloni, c’est difficile… Dans la Hongrie d’Orban, on oblige les femmes à écouter le cœur du fœtus avant d’avorter.

Pour la France, quelles autres leçons tirer de ce vote ?

L’autre leçon, c’est la maturité de nos élus : la droite est passée deux fois à côté de l’Histoire, sur la loi Veil et le mariage pour tous. Cette fois, elle ne s’est pas mise en travers d’une mesure plébiscitée par les Français. Un flop pour Gérard Larcher, pour qui la Constitution n’est pas « un catalogue de droits sociaux et sociétaux », comme si avorter était un caprice sur commande !

Un vote qui oblige aussi Marine Le Pen, qui a sacrément varié sur le sujet, alors que plusieurs députés RN sont entrés en politique en militant contre l’IVG.

Enfin, bonne nouvelle : même en majorité relative, même avec un Sénat dans l’opposition, il est possible, dans une France polarisée, de trouver des consensus pour enrichir cette Constitution, à laquelle, on ne touche, dit-on, qu’avec une main qui tremble…

Merci à toutes celles et ceux qui ont voté sans trembler !

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