Le banjo, "c'est comme le champagne, ça monte à la tête"

Percy Copley, banjoïste
Percy Copley, banjoïste
Le banjo, comment ça marche ? - Culture Prime
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Le banjo, "c'est comme le champagne, ça monte à la tête"

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Perçu comme un symbole de l'Amérique profonde, le banjo est lié à l'histoire de l’esclavage dans ce pays. Pour France Musique, Percy Copley, banjoïste, revient sur les origines complexes de son instrument et explique son fonctionnement.

France Musique : Comment fonctionne le banjo ?

Percy Copley : C’est un instrument complexe au principe de base pourtant très simple. Le banjo est fait d’une caisse de résonance prolongée d’un manche. Ce dernier est équipé de frettes pour jouer les notes et de mécaniques pour tendre les cordes et les accorder. La caisse est formée d’un cercle de bois sur lequel est tendue une peau, comme s'il s’agissait d’un tambour. Elle est munie d’un chevalet qui supporte les cordes. Ces dernières mettent en vibration la peau par l’intermédiaire du chevalet. Le son est ainsi projeté et amplifié par l’instrument lui-même. Pour jouer, on pince les cordes de la main droite et on va chercher les notes sur le manche avec la main gauche, grâce aux frettes. Durant son histoire, les facteurs d’instruments ont voulu fabriquer un banjo capable d’amplifier d'avantage le son. Ils ont donc ajouté un fond et une armature en métal à la caisse de résonance. Cela a eu comme effet secondaire d’alourdir l’instrument, qui peut peser jusqu’à une dizaine de kilos dans ses plus grosses versions.

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Racontez-nous l’histoire du banjo.

Elle est controversée, car elle est liée à une autre histoire : celle de l’esclavage aux États-Unis. Les esclaves originaires d’Afrique de l’Ouest ont apporté sur le nouveau continent, en plus de leur culture, un instrument, l’ekonting. Il était fabriqué à partir d’une peau animale tendue sur une gourde évidée, laquelle était munie d’un manche et de cordes. Cet instrument traditionnel a subi une lente mutation et est devenu, petit à petit, le banjo. Au XIXe siècle, le banjo était utilisé dans les “minstrel shows”, des spectacles profondément racistes durant lesquels des blancs se noircissaient le visage (blackface). Le tout en jouant du banjo sur des comédies volontairement grotesques pour se moquer des Afro-américains. Malgré cela, ces spectacles et les troupes qui les donnaient ont participé à l’accroissement de la popularité et de la diffusion de l’instrument.

Au début du XXe siècle, l’émergence des premières guitares électriques amplifiées a engendré un net recul du banjo. Il a fallu attendre l’arrivée d’un nouveau genre musical, la country, et de sa version bluegrass, pour à nouveau entendre parler du banjo. On doit le phénomène bluegrass à Bill Monroe et à l’ensemble qu’il a créé : “Bill Monroe and his bluegrass boys”, originaire de l’état du Kentucky aux États-Unis. Le nom “bluegrass” vient d’une variété d’herbe qui pousse partout dans cet état, surnommé “The bluegrass state”. Leur musique était plus rapide et plus complexe que ce que les gens avaient l’habitude d’entendre habituellement sur un banjo. Cette musique s'est diffusée rapidement par le biais de la radio.

Le banjo devient le symbole de l'Amérique rurale. Grâce au cinéma, et notamment au film Délivrance de John Boorman, il acquiert une renommée internationale

Quelle est la principale difficulté du banjo ? 
Sa complexité. Il faut attraper les bonnes cordes tout en cherchant les bonnes notes, ajoutez à cela les différentes techniques et modes de jeux qui demandent parfois de carrément désaccorder l’instrument et vous voyez le tableau. En tant que banjoïste, on ressent donc une profonde satisfaction lorsqu’on commence à maîtriser l’instrument. D’ailleurs, à l’origine, le banjo est pensé pour accompagner d’autres musiciens ou des chanteurs. Donc savoir jouer du banjo seul, c’est bien. Mais réussir à en jouer en groupe, c’est encore mieux !

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