Les jeunes et l'Europe : "Le grand combat climatique devient le combat de l'Europe et de la civilisation, je pense que la jeunesse l'a compris", estime Jean Viard

"Pour les jeunes, l'Europe, c'est devenu naturel", estime Jean Viard. En France, un tiers des moins de 30 ans affirment que la priorité numéro un, c'est la lutte contre le réchauffement climatique, selon une enquête IPSOS pour franceinfo et Brut. (Illustration) - DMPHOTO / E+ / GETTY IMAGES
"Pour les jeunes, l'Europe, c'est devenu naturel", estime Jean Viard. En France, un tiers des moins de 30 ans affirment que la priorité numéro un, c'est la lutte contre le réchauffement climatique, selon une enquête IPSOS pour franceinfo et Brut. (Illustration) - DMPHOTO / E+ / GETTY IMAGES
"Pour les jeunes, l'Europe, c'est devenu naturel", estime Jean Viard. En France, un tiers des moins de 30 ans affirment que la priorité numéro un, c'est la lutte contre le réchauffement climatique, selon une enquête IPSOS pour franceinfo et Brut. (Illustration) - DMPHOTO / E+ / GETTY IMAGES
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À une semaine tout juste des élections européennes, le 9 juin prochain, prenons le pouls des jeunes. Comment comptent-ils voter ? Quelles sont leurs priorités ? Décryptage avec le sociologue Jean Viard.

Aujourd'hui, dimanche, on est pile à une semaine du 9 juin, du vote pour les élections européennes en France. On va parler notamment de ce qu'il en est pour la jeunesse, parce qu'une enquête est parue cette semaine, qui s'intéresse à l'appréciation de ces élections par la jeunesse. Moins d'un tiers des 18-30 ans dans cette enquête Ipsos pour franceinfo et pour Brut, affirment pour le moment qu'ils comptent aller voter.

franceinfo : Comment est-ce que vous comprenez les chiffres de cette enquête sur le vote des 18-30 ans ?

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Jean Viard : D'abord, je trouve que cette façon de ne plus parler que du rapport entre les sondages et les médias, c'est fatigant, parce que la plupart des gens ne s'intéressent aux élections que les 10 derniers jours, et une bonne partie, le jour des élections. Et notamment les jeunes, parce qu'ils ont d'autres soucis dans la tête que les européennes, deux ou trois jours avant, ils vont se dire qu'est-ce que je fais moi ? Je ne sais pas combien de jeunes iront, et je sais effectivement qu'ils votent un peu moins que les plus anciens.

C'est ce qu'on voit depuis toutes les dernières élections, les jeunes votent moins...

Oui, mais bien entendu parce qu'on est dans une démocratie des retraités, où effectivement c'est eux qui tiennent des conseils municipaux, qui se dévouent dans les associations, qui vont voter, etc. La classe démocratique commence à peu près à 60 ans. Est-ce que c'est grave ? Je n'en sais rien. Ce qui est sûr, c'est que les jeunes ont d'autres façons de s'engager dans la société. Ils ont des formes d'action directe parce qu'ils n'ont plus confiance.

Ça témoigne peut-être du fait qu'ils ne se sentent pas représentés ou que leur sort n'intéresse pas forcément les élus ?

Oui, parce que les forces politiques ne les représentent pas bien, mais c'est aussi parce que le monde a tellement changé que les grandes préoccupations ne sont plus les mêmes. Après les jeunes, ils votent pour des partis plus protestataires. Si on ne proteste pas à 20 ans, ça va être dur à 60 ans. Donc les jeunes votent plus pour le Rassemblement national ou pour LFI que les autres générations. Ça a toujours été comme ça. Mais soyons très prudents dans ces analyses, parce que ce qui se passe est que pour les jeunes, l'Europe, c'est devenu naturel. C'est comme d'habiter en France ou d'habiter en Bretagne, ça ne se discute plus. Je crois qu'il faut le dire comme ça.

D'ailleurs, on peut citer ces chiffres dans cette enquête : 30% des 18-30 ans affirment que l'Europe, c'est une opportunité, 23% y voient une chance. Donc, il y a une grande majorité qui voit ça très positivement, en effet ?

Bien sûr. Après, on voit très bien que le vote pour le Rassemblement national atteint 40% chez les jeunes ruraux, c’est-à-dire les populations qui se sentent loin de la société, pour des raisons géographiques, économiques ou culturelles, ont tendance à voter plus pour des partis protestataires. Mais regardons les choses comme ça. Ce qui est positif, c'est que l'Europe est devenue un acquis. Je pense que c'est ça qui est quand même fondamental.

L'autre question, c'est que ces élections européennes, on ne vote ni pour un programme, ni pour un candidat. D'abord, c'est compliqué de comprendre les majorités à Bruxelles, on ne sait pas très bien qui gouverne, qui ne gouverne pas, On ne sait pas très bien comment mon vote va modifier le choix de la présidente, parce qu'elle est issue d'un parti de droite, mais elle n'est pas soutenue par son parti. Enfin, c'est très compliqué à comprendre. Donc on fait un vote, je dirais, comme un vote d'humeur.

Et pour les jeunes, la priorité numéro un de l'Union européenne pour les prochaines années, ça doit être la lutte contre le réchauffement climatique. Un tiers des moins de 30 ans affirment que c'est la priorité numéro un. L'Union européenne, c'est le bon échelon pour agir. Vous pensez que c'est un vecteur de mobilisation ?

Mais oui, c'est vrai en France et au Danemark, on a des taux de même nature, et c'est très bien. La jeunesse est rentrée dans la bataille climatique de façon quand même relativement importante. Mais effectivement, une grosse partie de la jeunesse est au cœur de la bataille climatique.

Je pense que c'est essentiel, y compris parce que c'est quand même eux qui vont vivre le plus longtemps le réchauffement climatique, puisqu'en principe, ils ont la chance de vivre plus longtemps que les vieux. Donc on est là-dedans, la société est en train de tourner. Le grand combat climatique devient le combat de l'Europe et de la civilisation, et je pense que la jeunesse l'a compris.

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