"On en a marre de se laisser faire" : en Nouvelle-Calédonie, des lynchages évités de peu

Il faut attendre l'intervention des forces de l'ordre pour que les esprits se calment : le lynchage de cet émeutier par des habitants exaspérés était proche. ©Radio France - SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO
Il faut attendre l'intervention des forces de l'ordre pour que les esprits se calment : le lynchage de cet émeutier par des habitants exaspérés était proche. ©Radio France - SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO
Il faut attendre l'intervention des forces de l'ordre pour que les esprits se calment : le lynchage de cet émeutier par des habitants exaspérés était proche. ©Radio France - SANDRINE ETOA-ANDEGUE / FRANCEINFO
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Le quartier de Rivière-Salée, dans le nord de la commune de Nouméa, était le théâtre d'une opération policière, vendredi 31 mai. La situation reste explosive entre des riverains excédés et des émeutiers qui tentent de ralentir les forces de l'ordre.

La situation reste extrêmement tendue en Nouvelle-Calédonie. Un peu plus de deux semaines après le début des émeutes consécutives au vote de l'Assemblée nationale sur le dégel du corps électoral, les opérations des gendarmes et policiers se poursuivent.  Une opération de police, qui a mobilisé 400 membres des forces de l'ordre, a ainsi été menée vendredi 31 mai 2024 "avec succès" dans le dernier quartier de la ville de Nouméa qui n'était pas encore passé sous contrôle des forces de l'ordre, a annoncé Gérald Darmanin.

Le ministre de l'Intérieur a annoncé "l'interpellation de 12 individus et la suppression de 26 barrages" : ce quartier de Rivière-Salée, dans le nord de la commune de Nouméa, était bloqué par de "nombreux barrages tenus par des individus dangereux", selon les forces de l'ordre. Preuve de cette tension extrême entre des émeutiers et des habitants : une scène violente, dont franceinfo a été témoin.

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Sur un barrage tenu par des habitants de Rivière-Salée afin de se protéger des émeutiers, chacun scrute l'avancée de l'opération menée par les forces de l'ordre, dans le bruit de l'hélicoptère de l'armée de l'air et les explosions des grenades de désencerclement tirées sans discontinuer.

"Passe pas par là ! Ça va péter"

Alors que les blindés de la gendarmerie continuaient leurs rondes dans le quartier, les envoyés spéciaux de franceinfo ont pu voir trois jeunes hommes, des émeutiers, réinstaller des barricades sur la route pour gêner l'arrivée des forces de l'ordre. Aussitôt, les blindés se sont rapprochés. Les émeutiers ont alors voulu faire demi-tour et ont tenté de passer devant un autre barrage, tenu cette fois par les habitants du quartier. Plusieurs hommes et femmes les ont encerclés, insultés. "Passe pas par là ! Ca va péter", peut-on entendre résonner. L'un des trois "barragistes", comme on les appelle ici, s'est pris un coup au visage, dans ce qui aurait pu rapidement dégénérer en lynchage. C'est l'arrivée des blindés et de gendarmes mobiles qui empêche le drame, en interpellant l'un des émeutiers. Les deux autres, eux, se sont enfuis sur les hauteurs.

"Opération de gendarmerie en cours, rentrez chez vous !", hurle un fonctionnaire. Dans son jardin, Joe, casque de militaire sur la tête, confirme qu'un drame a été évité de peu. "Ce sont les mêmes qui sont venus voler dans les maisons, les mêmes qui remettent les barrages. Ça fait trois semaines qu'on ne dort pas, qu'on doit surveiller nos maisons et il y en a ras-le-bol !"

Selon lui, cette violence à coups de battes de base-ball n'est qu'une réponse : "On en a marre de se laisser faire. C'est ce qu'ils ont fait aussi à des civils qui passaient. Ils ont voulu taper une dame chez elle, avant de la menacer de la brûler vive pour lui voler les clés de sa voiture", raconte Joe.

En voyant les gendarmes mobiles, cuirassés casqués, avec des boucliers, appuyés par des blindés légers, Joe déclare : "Cela veut dire qu'on a été enfin entendu. On avait l'impression d'être abandonnés par la police. Quand on appelle, ils disent qu'ils ne peuvent rien faire. Si la maison est en feu, ils disent : 'Mettez-vous en sécurité, attendez sur la route'... Et là, ils reprennent un peu le contrôle", souligne Joe, qui observe l'opération de sécurisation de sa rue. Désormais, il espère que les forces de l'ordre restent dans son quartier au moins jusqu'à la fin du week-end.