Le 2 mai dernier, Roselyne Bachelot a été choisie pour succéder à Jacques Toubon à la présidence de la Fédération des Ensembles Vocaux et Instrumentaux Spécialisés. L'ancienne ministre de la Culture présente ses objectifs pour défendre ces formations éprouvées par la crise.
- Roselyne Bachelot éditorialiste, ancienne ministre
Ancienne ministre de la Culture et future présidente de la Fédération des Ensembles Vocaux et Instrumentaux Spécialisés - la Fevis, Roselyne Bachelot succèdera le 19 juin à un autre ancien ministre qui voulait passer la main, Jacques Toubon.
Jean-Baptiste Urbain : Qu'est-ce que la la Fevis, et à quoi sert-elle ?
Roselyne Bachelot : Ce sont ces ensembles vocaux et instrumentaux qui ne dépendent pas d'une maison comme les orchestres ou les chœurs d'opéra, ou comme l'orchestre de Radio France. Ce sont des orchestres indépendants. Et effectivement, il y a 205 ensembles dans la Fevis, qui traversent aujourd'hui des difficultés. J'espère que l'on va pouvoir en parler ensemble et j'entends me déployer pour aider, pour promouvoir, ces acteurs indispensables de la vie musicale, de la vie culturelle de notre pays.
Précisément, le monde de la culture en France, comme d'autres secteurs, est confronté à des difficultés financières. Il y a d'un côté l'inflation, la hausse des charges et de l'autre une baisse, année après année, de certaines aides publiques. Etes-vous inquiète pour l'avenir de ces ensembles indépendants ?
Roselyne Bachelot : Oui, il y a une sorte d'étau qui se referme sur les indépendants, qui sont les adhérents de la Fevis. On a observé une diminution de presque 100 millions d'euros des budgets destinés aux spectacles vivants. Mais il y a aussi des exigences nouvelles, qui sont normales. Je pense aux exigences écologiques, par exemple. Il y a l'envol des coûts liés à l'inflation et le fait que les programmateurs, les maisons qui accueillent ces ensembles, veulent faire aussi de la place à d'autres types de musiques. C'est tout à fait normal, mais évidemment ça cause des difficultés, à un niveau plus ou moins important selon la notoriété des ensembles. Donc, je me déploierai, à la tête de la Fevis, sur plusieurs secteurs et sur plusieurs actions. Nous sommes un opérateur pour tous ces ensembles. On va se retrouver en octobre à la Philharmonie, pour une sorte de salon où les structures peuvent venir faire leur marché. On se retrouvera également, en juillet à Avignon pour le Festival Interférence dans la collection Lambert et à la Chapelle du Miracle, pour faire connaître un certain nombre de nos structures, de nos ensembles aux organisateurs de concerts.
Quels sont les leviers, les marges de manœuvre pour soutenir, pour défendre ces ensembles ? Avez-vous l'oreille du pouvoir, d'Emmanuel Macron, du gouvernement ?
Il faut agir sur l'ensemble de nos "clients", c'est-à-dire l'État, bien sûr, les collectivités locales, les mécènes. Il y a des mécènes très importants dans le domaine - on pense à la Caisse des dépôts, à la Société Générale, à Orange, mais aussi à des mécènes privés. Il faut s'activer aussi sur les OGC, les organismes de gestion collective, qui ont des financements pour organiser des concerts, la SACEM, la DAMI, SPEDIDAM, en nous battant pour évidemment préserver quelque chose de tout à fait important, ce qu'on appelle la redevance pour copie privée, qui nous permet d'obtenir des financements. C'est tout cela que nous faisons. Bien sûr, on a des fonctions d'observatoire de l'activité de nos structures. Et puis, nous sommes également un espace de ressources, qui permet à nos adhérents de retrouver un certain nombre d'informations. C'est vraiment sur tous ces leviers que je veux agir, à la suite bien sûr de Jacques Toubon, sans doute aussi en renforçant notre équipe, peut-être avec un agent supplémentaire qui nous permettrait d'étoffer notre action. Et c'est sur tous ces secteurs que je vais me déployer en organisant et en jouant de mon influence, réelle ou supposée, mais je pense réelle.
Tous ces ensembles vocaux et instrumentaux sont une richesse pour la vie culturelle et musicale, mais n'y a-t-il pas aussi une terrible concurrence entre eux ? Est-ce qu'il n'y a pas trop d'ensembles ?
Moi, je pense qu'il n'y a jamais trop d'acteurs de la culture. La vision malthusienne, selon laquelle il faudrait serrer le kiki à un certain nombre, non, certainement pas. Mais c'est vrai, vous avez raison, il y a de la concurrence, d'autant que les grandes structures, qui peuvent engager nos ensembles, lorsqu'elles traversent elles-mêmes des difficultés, diminuent la programmation artistique. Et si au lieu d'avoir 10 concerts, une structure n'en a que 7 ou 8, bien évidemment, on traverse de grandes difficultés de gestion au jour le jour. Donc moi, je ne suis pas du tout pour avoir une vision de restriction, parce qu'il faut garder ce tissu culturel. Il y a évidemment des ensembles qui sont hyper connus dans le monde entier. On pense par exemple à William Christie, qui, avec son ensemble Les Arts Florissants, nous a donné une Médée absolument extraordinaire à l'Opéra Garnier. Car dans la fosse de l'Opéra de Paris, il n'y a pas que l'orchestre de l'Opéra de Paris, il y a aussi des ensembles indépendants !
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