Slovénie, "Droits des minorités" : épisode • 15 du podcast Les termes du débat européen

Cérémonie pour le trentième anniversaire de l'indépendance de la Slovénie, à Ljubljana, le 25 juin 2021. ©AFP - Jure Makovec
Cérémonie pour le trentième anniversaire de l'indépendance de la Slovénie, à Ljubljana, le 25 juin 2021. ©AFP - Jure Makovec
Cérémonie pour le trentième anniversaire de l'indépendance de la Slovénie, à Ljubljana, le 25 juin 2021. ©AFP - Jure Makovec
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Récemment, un parti de la coalition gouvernementale slovène a proposé une loi visant à octroyer des droits culturels aux personnes originaires des Balkans. Après l'indépendance de 1991 des milliers de personnes se sont retrouvées sans droits. Quelle est la place des minorités aujourd'hui ?

Avec
  • Laurent Hassid Enseignant en relations internationales à Paris XIII et spécialiste de la Slovénie
  • Nebojsa Vukadinovic Enseignant à Sciences Po Paris au campus de Dijon

Le 1er mai prochain, la Slovénie célèbrera les vingt ans dans son entrée dans l’Union européenne. Cette nation de l’ex-Yougoslavie, née le 25 juin 1991, n’a connu que dix jours de guerre au début de celle qui a déchiré la Yougoslavie, et s’est toujours considérée à part dans cet ensemble politique.

Plus riche que les autres républiques, elle a regardé plus au Nord et s’est constituée en négligeant, voire en effaçant, la culture et l’identité des autres composantes de l’ensemble yougoslave.

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C’est ainsi que, depuis vingt ans, court l’idée de reconnaître les droits des minorités croates, macédoniennes, serbes, monténégrines et albanaises encore présentes en Slovénie aujourd’hui.

La majorité composite de gauche et de centre qui gouverne le pays depuis deux ans y est favorable mais se heurte au refus d’une partie de la population, soucieuse de préserver une langue et culture slovènes malmenées par les différentes dominations qu’a connu cette région.

L’affaire des « effacés »

Nebojsa Vukadinovic : « Au moment de l'indépendance en 1991 il y a eu une nouvelle constitution slovène qui reprenait certains éléments de la constitution yougoslave de 1974 concernant les droits des minorités. " Mais les populations venant de l'ex-Yougoslavie étaient nombreuses. Parmi celles-ci, au moment de l’indépendance, environ 1% de la population du pays va se retrouver sans droits civiques". Ainsi, ils vont être complètement effacés des registres. Officiellement, c’est justifié par le fait que les populations d’ex-Yougoslavie ne se sont pas manifestées suffisamment tôt pour être enregistrées, mais officieusement, les personnes qui ont été effacées racontent qu'elles n'ont même pas été contactées pour réaliser les démarches administratives et qu’elles n'ont pas reçu les dossiers à remplir ».

Laurent Hassid poursuit : « L’affaire n’a été médiatisée qu'à partir de 2003, lorsque les partis de droite ont organisé un référendum d'initiative populaire sur la question. Pendant plus de 11 ans, il y a près de 25 000 personnes qui ont pensé qu'il s'agissait d'erreurs individuelles plutôt que d’une stratégie d'État. Pourtant cette affaire avait été mise en lumière en octobre 1991 par une députée du centre-gauche qui avait souhaité faire voter un amendement prévoyant un statut pour les personnes qui n’avaient pas la nouvelle citoyenneté slovène. Il y a donc eu une lente prise de conscience de la part des populations de Slovénie, mais aussi de la part de la communauté internationale ».

Pour aller plus loin :

- Laurent Hassid est l'auteur de l'ouvrage : " Une géopolitique de la Slovénie" (Editions la Route de la Soie, 2021)

- Nebojsa Vukadinovic est l'auteur de la thèse : " Transitions, désintégrations, reconstructions dans l'espace yougoslave, 1989-1999" (Editions ANRT, 2006)

- A lire, l'article de Nebojsa Vukadinovic : " Art et politique dans l'espace yougoslave 1980-1990" (Revue des études slaves, 2018)

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