De Gino Bartali à Megan Rapinoe en passant par Tommie Smith, découvrez l'histoire de ces athlètes de haut niveau qui ont marqué l'histoire du sport par leur engagement politique, par un geste symbolique fort, déployé sur la pelouse d'un stade ou sur un podium de Jeux Olympiques.
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Sport et politique : des athlètes engagés
Gestes de résistance symboliques, inscriptions sur un maillot ou slogans criés dans les tribunes, comment les sportifs ont-ils manifesté leurs convictions politiques à travers l'histoire ? Et au-delà de leur caractère symbolique, ces gestes ont-ils un impact sur l’opinion publique ? Quelle est la répercussion d’un poing levé par un champion sur un podium ? Sur les pelouses des stades, le sport peut-il devenir un outil de lutte politique ?
Jusqu’au milieu du XXe siècle, le sport est considéré comme un espace apolitique. D’où vient cette conception selon laquelle les discours partisans n’ont pas leur place dans les compétitions sportives ? Pour le savoir, il faut revenir au contexte historique des régimes totalitaires qui ont marqué le XXe siècle. Après la Première Guerre mondiale, les régimes fasciste, nazi et soviétique opèrent en effet une mainmise sur les fédérations et organisations sportives nationales et instrumentalisent les performances des champions à des fins de propagande. Dans ce contexte, la neutralité politique du sport devient un enjeu majeur dans les régimes démocratiques. Pour ce qui concerne l’olympisme en particulier, la neutralité est l’essence même des Jeux. Dans la charte olympique, l’article 50 stipule : “Aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique.”
La France, pays qui a vu naître Pierre de Coubertin et l’idée de l’olympisme moderne, est traditionnellement réticente à la prise de parole publique des sportifs, quand il s’agit d’évoquer les problèmes politiques ou sociaux. Aux Etats-Unis en revanche, à partir des années 60 pourtant, on assiste à une politisation du sport avec la montée en puissance du mouvement d’émancipation des Noirs et de la lutte pour les droits civiques. Des champions emblématiques vont prendre publiquement position, comme par le boxeur Mohammed Ali qui multiplie les déclarations en faveur de la justice raciale, de la justice économique dans les ghettos noirs ou encore contre la guerre du Vietnam.
L’histoire de l’engagement politique des sportifs se poursuit au XXIe siècle avec la mort de George Floyd, cet Américain noir tué le 25 mai 2020 par un policier lors d’une interpellation. Cette nième manifestation du racisme systémique qui sévit au sein de la police américaine bouleverse la société américaine tout entière. Des sportifs reconnus comme la footballeuse Megan Rapinoe ou les basketteurs de la NBA vont prendre position.
Depuis le refus de faire le salut fasciste d’un champion cycliste italien dans les années 30 au genou à terre posé par des footballeuses américaines pendant l’hymne américain, cette sélection d'émissions propose de retracer l’histoire de l’engagement politique du monde du sport, au travers de quelques gestes emblématiques.
1938. Gino Bartali, un champion cycliste dans l'Italie fasciste
Dans les années 1930, en même temps qu'il instaure les premières lois raciales, le régime fasciste cherche à instrumentaliser les sportifs afin d'affirmer la domination italienne également dans le monde du sport. En juin 1938, l'équipe nationale de football devient championne du monde. Lors du match de finale qui les oppose à la Hongrie, les joueurs italiens portent la chemise noire, et font le salut fasciste lors de la remise de la coupe. Un mois plus tard, Mussolini impose au champion cycliste Gino Bartali (1914-2000) de participer au Tour de France pour la deuxième année consécutive. Après une blessure et un abandon en 1937, 1938 sera l'année de sa victoire. Mais sur la plus haute marche du podium, Bartali ne fait pas le salut fasciste... ( Une histoire particulière, 2 x 29 min)
1966. Mohamed Ali "The Greatest" contre la guerre du Vietnam
Le 25 février 1964, Mohamed Ali (1942-2016) devient champion du monde des poids lourds à l'issue d'un combat mythique qui oppose ce tout jeune homme au champion du monde en titre, Sonny Liston. A l'époque, le boxeur s'appelle encore Cassius Clay. Le 6 mars de la même année, sa conversion à l'islam et son nouveau nom, Mohamed Ali, résonnent comme une provocation pour l’Amérique conservatrice. La réputation du champion grandit... En 1964, son choix de devenir objecteur de conscience pour ne pas servir dans l'armée américaine et partir combattre au Vietnam, finit de forger sa légende. Au-delà d'une figure tutélaire pour la communauté afro-américaine, Mohamed Ali devient un héros de la jeunesse hippie blanche et de celle du Tiers-monde. ( Grande traversée Mohamed Ali, combats, 5 x 1h49 min)
1967. Kathrine Switzer pour les droits des femmes
Il y a 50 ans, faire du sport n’allait pas de soi pour une femme… En 1967, Kathrine Switzer est étudiante, et passionnée de course à pied. Accompagnée de son entraîneur et de son petit ami, elle décide de participer au marathon de Boston. Le 19 avril 1967, alors qu'elle court, Jock Semple, organisateur de la course, la bouscule et tente de lui arracher son dossard. Pourquoi cette violence ? Parce que Kathrine Switzer est une femme et voulait courir officiellement un marathon. L'incident changera la vie de cette Américaine de 20 ans et l’histoire du sport. Sur le chemin du retour, alors qu'elle s’arrête dans une station essence, la jeune femme découvre stupéfaite, à la une du magazine Life, la photo de son agression. La voilà célèbre. Après ses études de journalisme, Kathrine Switzer se lance dans le combat de la reconnaissance des femmes dans le monde du sport. Ses articles et ses performances vont populariser la course à pied féminine. En 1972, le marathon de Boston s’ouvre enfin aux femmes. Kathrine finit 3e... ( Une histoire particulière, 2 x 29 min)
1968. Tommie Smith lève le poing sur le podium des J.O.
Aux Jeux Olympiques de Mexico en 1968, Tommie Smith et John Carlos, respectivement arrivés 1er et 3e lors de la finale du 200 m, montent sur le podium pour recevoir leur médaille d'or et de bronze. Pendant que retentit l'hymne américain, les deux athlètes lèvent le poing, une référence explicite au mouvement Black Power et à Malcolm X. Les sportifs ont décidé de ce geste pour protester contre le traitement injuste des Noirs aux États-Unis. Il est pour les deux hommes le moyen de manifester publiquement leur désaccord avec les politiques publiques de leur pays qui légitiment la reproduction de l’oppression des Noirs. Considérés sur le moment comme des traîtres par une partie de l'opinion publique américaine qui interprète ce geste comme une insulte à la nation, celui-ci reste aujourd'hui l’un des gestes les plus marquants de l'histoire du sport en faveur de l’émancipation des minorités. ( Le Cours de l'histoire, 51 min)
2013. Black Lives Matters. Les sportifs mettent un genou à terre
Megan Rapinoe, championne du monde de football, Lebron James, star du basketball, et Mickael Jordan, autre icône du basket appartiennent à l'élite du milieu sportif. Tous trois ont choisi de mettre leur renommée au service d’une cause : la dénonciation du racisme et des violences policières aux Etats-Unis. En écho et en soutien au mouvement Black Lives Matter, ces sportifs, et bien souvent toute leur équipe avec eux, posent ostensiblement un genou à terre ou lèvent le poing avant de commencer un match, pendant que retentit l'hymne américain. Si le geste est symbolique, il n’est pas sans risque. En 2016, le joueur de football Colin Keapernick qui refuse de se lever pendant l'hymne s'attire les foudres du président Trump et d’une partie de l’opinion publique, choquée par ce qu'elle interprète comme un geste d'offense à la nation. Mis sur la touche par son club, Keapernick paiera son geste au prix fort et devra quitte le circuit professionnel. En effet, si le sport américain a une histoire politique depuis les années 1960 et le mouvement des droits civiques, pour beaucoup de citoyens, il reste perçu comme un divertissement qu'aucun militantisme ne doit venir perturber. Cette émission propose d'analyser le réveil du mouvement sportif américain, dans la foulée du mouvement Black Lives Matters. ( Cultures Monde, 58 min )
2020. Le boycott des joueurs de basket de la NBA
Le 23 août 2020, à Kenosha dans le Wisconsin, Jacob Blake, un Afro-Américain de 29 ans, est victime de tirs policiers qui l'atteignent dans le dos. L'affaire, qui survient quelques mois seulement après la mort de George Floyd, suscite de nouveau des émeutes et un regain de mobilisation du mouvement Black Lives Matters. Engagés contre le racisme, de nombreux sportifs déploient un nouveau répertoire de gestes de contestation et vont jusqu'à battre en brèche le principe olympique de neutralité. Dans le monde du basket en particulier, l'affaire déclenche un boycott historique des joueurs de la NBA, suivie par d’autres ligues sportives qui décident également de suspendre leurs compétitions. Cette émission propose d'inscrire cet épisode dans une histoire plus longue des rapports entre la popularité sportive et l'avancée des droits aux Etats-Unis. ( Le Temps du débat, 38 min )
Références