Radiohead, la face rock : un concert idéal du XXème siècle

Radiohead en concert à Leeds ©Getty - Rune Hellestad - Corbis
Radiohead en concert à Leeds ©Getty - Rune Hellestad - Corbis
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Ce soir, on va célébrer le parcours d’un groupe qui a fait beaucoup de chemin depuis sa naissance il y a plus de trente ans déjà. Et dont j’ai retrouvé ce titre, pas le plus connu, sans doute, mais ce ne sera pas une mauvaise entrée en matière.

« Thinking About You », une chanson méconnue ou oubliée, signée en 1992 par un jeune groupe anglais du nom de Radiohead qui publiait alors son premier album, Pablo Honey. Un groupe formé par cinq musiciens de la région d’Oxford, dont deux frères, Colin et Jonny Greenwood, passés par le Conservatoire. Ils jouaient en fait ensemble depuis plusieurs années déjà, sous un autre nom. Ils avaient, comme on dit, longtemps galéré, avant de signer un premier contrat avec la compagnie de disques EMI. Dont les responsables ont été, après toutes ces années, les premiers à croire en eux. La frustration, le sentiment d’être rejeté, de ne pas trouver sa place dans un monde hostile ou indifférent, animait le chanteur et parolier Thom Yorke depuis longtemps. J’aurais évidemment pu choisir « Creep » comme entrée en matière. Oui, "Creep", une des premières de Radiohead et qui, brusquement, il y a trente ans, en 1993, a apporté une popularité aussi massive qu’inattendue à Radiohead. Une popularité paradoxale. Étonnant que le public plébiscite en masse une chanson dont le titre était "Creep", pauvre type ou connard, et dont les paroles disaient : « Je veux un corps parfait, je veux une âme parfaite, je veux qu’on me remarque, je rêve d’être spécial mais je suis un pauvre type, un mec bizarre, qu’est-ce que je fous là ? C’est pas ma place, etc etc ». Un concentré d’auto-détestation qui était dans l’air du temps. En 1993, Beck, un jeune musicien californien, sortait une chanson intitulée « Loser » qui allait faire le tour du monde, dans laquelle il disait : "Je suis un loser, pourquoi tu me tues pas". Kurt Cobain, au sein de Nirvana, venait de populariser son mal de vivre, portant jusqu’à l’incandescence la haine de soi, le désastre de vivre, pourrait-on dire.

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Dans la chanson que vous venez d’entendre, « Thinking About You », Thom Yorke exprimait, comme dans « Creep », ce sentiment profond d’être rejeté, sur un ton mêlant dédain, sarcasme et colère. Assez proche, au fond, de certaines chansons d’Elvis Costello dont il était alors un admirateur. Je cite les paroles de « Thinking About You », elles expriment le point de vue d’un gars qui regarde la photo de son ex-petite amie dans sa chambre, une fille qui s’est sans doute éloignée de lui et navigue désormais dans un autre monde, comme si elle était devenue une star et lui était resté un cloporte, si j’ose dire. « Putain, chantait Yorke à vingt-trois ans, je vois encore ta photo quand je suis dans mon lit, et moi je me touche, qu’est-ce que ça peut te foutre puisque les autres gars sont tellement, tellement mieux que moi ». Eh oui, ça fait mal. Encore une remarque, pour donner du contexte : Thom Yorke ne parlait pas d’un mal-être vague propre à beaucoup de jeunes gens. Il souffrait depuis l’enfance d’une infirmité particulière, l’obligeant à garder un œil mi-clos. Étudiant dans une université du sud-ouest de l’Angleterre, il avait trouvé beaucoup de réconfort et d’encouragement dans un cours qui lui a révélé ce qu’on a pu appeler chez nous l’art brut, soit l’art propre aux prisonniers, aux délinquants et aux marginaux, tous ceux, toutes celles auxquels il est impossible de trouver une place légitime dans la société.

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Alors ce soir, ce ne sera pas un best of de Radiohead. Mais un rappel de l’énergie particulière propre à ce groupe dans les années 90, années durant lesquelles Radiohead était encore un jeune groupe de rock, qui n’avait pas encore pris un virage vers des sons et textures électro plus expérimentales. Ce sera donc, vous connaissez la formule, une sorte de concert idéal de Radiohead, mais du Radiohead de la fin du vingtième siècle, en somme. Qui a laissé un souvenir inoubliable à ceux qui, j’ai la chance d’en faire partie, ont vu le groupe sur scène dans ces années-là, quand il a publié son remarquable album The Bends, en 1995, dont je vous propose trois titres enchaînés, « My Iron Lung », « High and Dry » et « Fake Plastic Trees ».

Pour en savoir plus, écoutez l'émission...

Playlist :

Radiohead

« Thinking About You » album « Pablo Honey »

Radiohead

« My Iron Lung » album « The Bends »

« High and Dry » album « The Bends »

« Fake Plastic Trees » album « The Bends »

Radiohaed

« Just » album « The Bends »

« Lucky - Remastered » album « OK Computer OKNOTOTOK 1997 2017 »

« Karma Police - Remastered » album « OK Computer OKNOTOTOK 1997 2017 »

Radiohead

« No Surprises » album « OK Computer »

PJ Harvey

« This Mess We’re In » album « Stories from the City, Stories from the Sea »

Radiohead

« Knives Out » album « Amnesiac »

Radiohead

« The Daily Mail » single

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